5 novembre 2023 : crêtes des Ruelles
Nov 8, 2023 // By:Monique // No Comment
Huit Ourses et Ours serrent leurs chaussures et ajustent leurs sacs à dos devant la mairie d’Establet (du latin stabulum qui signifie « gite, auberge, demeure » (d’où le français « étable »).
Après quelques mètres, l’ourse de tête trace le chemin hors des sentiers. Elle ne s’encombre pas des obstacles, arbres morts, buissons, épineux, rien ne lui résiste. La petite troupe la suit cahin caha. Les Ours présents savent qu’avec elle on multipliera les « variantes » comme elle dit. Il lui arrive parfois de s’arrêter et de rebrousser chemin, c’est qu’il n’y a aucune possibilité de passer, un gouffre, une cascade,… Elle repart dans l’autre sens, à la recherche d’une nouvelle « variante ». Dès qu’on croise un chemin (le chemin), elle sort sa carte et, après l’avoir étudiée, annonce la suite «c’est par là » (en montrant du doigt le sommet), et d’ajouter « on pourrait continuer par le sentier mais ça devrait passer si on suit une ligne droite à 30° ». Et tous de monter dans la direction indiquée au milieu des herbes folles, repoussant les branches, contournant les buttes, en essayant de ne pas trop s’écarter de l’azimut défini.
Rejoindre la ligne de crête, jubilation de chercher un passage, d’inventer un itinéraire, de ne pas y aller par les quatre chemins, de monter à la fois tout droit et de zigzaguer pour éviter les obstacles, de trouver un sentier là où il n’y en a pas, de le suivre, avant d’en inventer un nouveau, les Ours sont tout à leur affaire, piétinant, frottant, se baissant, enjambant, s’accrochant à une branche, un rocher, testant un appui.
Une courte pause sur la crête des Ruelles, point de vue sur les vallées de la Motte et d’Establet, limite naturelle entre les pentes de chênaies à l’ouest et les espaces boisés de pins du plateau des Ruelles. L’altiport de la Chau attire le regard. La piste est agréée en 1987 en qualité d’Altisurface (terrain de montagne en pente permettant aux pilotes qualifiés « Montagne» de se poser dans le sens de la montée et de décoller dans le sens de la descente.)
Suivant la ligne de crête, les Ours s’étonnent devant la couleur des arbres, les teintes automnales se trouvant au-dessus des étages persistants. L’explication réside dans la composition de la forêt domaniale d’Aiguebelle, composée de pin sylvestre (44 %), pin noir d’Autriche (33 %), hêtre (14 %), chêne pubescent (8 %) et autres feuillus (1 %).
Le pique-nique, rapide, est arrosé par quelques gouttes de pluie et de rhum arrangé (aux litchis ce dimanche). Dans ce jeu de piste sans piste, on relie les points sur la carte, tout surpris de se retrouver sur un chemin balisé (qui prend des airs d’autoroute) : col du Fau, col de la Maure, crête des Ruelles, pas du Pousterlou. Et puis, tranquillement, la troupe mi-Ours-mi-escargot, redescend vers la petite commune.
Après 15 kilomètres sur 800 mètres de dénivelé, les Ours.e.s se retrouvent dans une tanière accueillante. Ils échangent, verre de bière à la main, autour de la vie qui va et qui vient, sont évoqués les peptides opioïdes, le renard et la belette, la patate douce, le four à infra rouge (avec démonstration de l’omnicuiseur vitalité)…
En bonus, le réseau de tensions entre le ciel et la terre
« Le vent et la pluie, de même que l’obscurité et la clarté, sont la manifestation phénoménale du souffle-énergie du paysage » Shitao
Eric D